L’Institut d’arbitrage SCC explore la sécurité des coûts dans l’arbitrage international

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Le 7 novembre 2024, le SCC Arbitration Institute (« SCC ») a organisé une discussion sur la garantie des frais dans l’arbitrage international, avec Anna Joubin-Bret, secrétaire de la CNUDCI ; Dr Faris Nasrallah, responsable de l’arbitrage chez Crescent Petroleum ; Dre Monique Sasson, associée DeliSasson et arbitre chez ARBITRA; Jake Lowther, avocat spécialisé, SCC Arbitration Institute, et animé par le Dr Crina Baltag, professeur Assoc. Université de Stockholm et membre du conseil d’administration du SCC.

Garantie des coûts –– un exercice d’équilibre

Après le discours de bienvenue de Caroline Falconer, secrétaire générale de la SCC, le Dr Baltag a présenté le sujet de la garantie des coûts comme étant l’un des sujets d’actualité actuellement abordés dans l’arbitrage international. La garantie des frais n’est qu’un des nombreux outils dont disposent les parties pour influencer les coûts de l’arbitrage. Il offre à la partie défenderesse la sécurité de pouvoir récupérer les frais engagés une fois la demande introduite par la partie adverse rejetée. En même temps, lorsque le manquement allégué a laissé le demandeur dans une situation financière vulnérable, une demande de garantie pour frais compromet la capacité d’une partie à poursuivre ses réclamations. Ainsi, une demande de cautionnement pour frais implique un exercice d’équilibre entre l’intérêt du défendeur à obtenir le recouvrement des frais défavorables et l’accès du demandeur à la justice arbitrale. Ceci est perçu par les tribunaux arbitraux comme un exercice d’équilibre dépourvu de normes uniformes et constitue donc un bon moment pour réfléchir à l’état actuel de la garantie des coûts dans l’arbitrage international.

Une plongée approfondie dans les coûts et les réflexions sur la sécurité

Le Dr Nasrallah a souligné les nombreux effets des coûts sur l’ouverture et la conduite des procédures d’arbitrage, qui touchent au cœur des éléments conceptuels et des conjonctures professionnelles les plus sensibles de l’arbitrage international. Les incitations financières motivent souvent la participation aux procédures arbitrales. De même, une concurrence en termes de coûts existe entre les institutions, les législateurs et les tribunaux pour que le processus le plus rentable guide la décision des parties sur le forum de règlement des différends. Les « trésors de guerre » des parties et les coûts sans cesse croissants des parties soulèvent des questions d’égalité des armes dans les procédures et affectent leur volonté d’entamer des négociations de règlement ainsi que les conditions d’un tel règlement. Les frais peuvent également avoir un effet dissuasif dans le cadre d’une procédure arbitrale visant à sanctionner des retards injustifiés. Une demande de garantie pour les frais pourrait avoir un effet de calibrage, encourageant les parties à rester dans les limites du raisonnable et empêchant les coûts de devenir incontrôlables.

Il est donc remarquable que de nombreuses lois nationales restent muettes quant au droit d’une partie au recouvrement des frais, sans parler de la garantie des frais. Cette constatation s’étend à un certain nombre de lois nationales de pays qui fournissent fréquemment le cadre procédural des procédures arbitrales, comme la France et la Suisse. De même, la communauté de l’arbitrage n’a pas encore trouvé de terrain d’entente quant aux coûts qui devraient être recouvrés. La partie gagnante devrait-elle être autorisée à récupérer les frais juridiques internes, les frais de personnel interne, les frais liés aux actions judiciaires accessoires, les frais et dépenses liés aux témoignages, les frais engagés pour la recherche des avoirs et les relations publiques liées aux litiges ? Quelles considérations devraient guider le tribunal dans l’exercice de son large pouvoir discrétionnaire concernant la répartition des frais ? Faris Nasrallah observe une tendance des règles institutionnelles à « se marier » avec les lois nationales du pays d’origine des institutions, dans ce qui peut être perçu comme un « nationalisme des coûts ». Le silence et la rareté de la couverture des coûts dans les lois arbitrales et les règles institutionnelles offrent un large pouvoir discrétionnaire qui conduit à s’appuyer sur les normes et pratiques arbitrales coutumières influencées par les cultures et la formation juridiques nationales.

Propositions du Groupe de travail III de la CNUDCI sur la garantie pour frais

L’observation du « nationalisme des coûts » appelle une perspective internationale. Mme Joubin-Bret a poursuivi la discussion en commentant les propositions du Groupe de travail III de la CNUDCI, actuellement chargé de réformer le règlement des différends entre investisseurs et États (« RDIE »). L’un des problèmes identifiés par le groupe de travail concerne les coûts et la durée de l’ISDS. Mme Joubin-Bret note un changement de pratique selon laquelle chaque partie paie ses propres frais aux investisseurs et aux États, demandant au tribunal de répartir les frais engagés. Dans le RDIE, la garantie des coûts peut jouer un rôle essentiel dans la mesure où les réclamations des investisseurs sont souvent déposées par des véhicules d’investissement dans l’État hôte, généralement de simples sociétés boîtes aux lettres. L’année 2022 a vu une réforme des règles d’arbitrage du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (« CIRDI » et « Règles CIRDI ») et l’introduction d’une disposition sur la garantie pour les frais dans la règle 53 du Règlement CIRDI. Pourtant, la nécessité d’uniformité dans les circonstances pertinentes à prendre en compte par le tribunal pour décider de la garantie pour frais demeure. Projet de disposition 5, sous-section 4 du document de travail 244 de la CNUDCI vise à répondre à ce besoin. Comme l’a souligné Anna Joubin-Bret, l’une des questions plutôt controversées à cet égard est le point e), qui ordonne au tribunal de prendre en compte l’existence d’un financement par des tiers lors de l’évaluation d’une demande de garantie pour frais. Alors que les questions de légitimité et de limites du financement par des tiers sont rigoureusement débattues, les rédacteurs cherchent à lier l’existence d’un tel financement à la demande de garantie pour frais afin d’empêcher les investisseurs de pouvoir investir sur un sinistre. et ne pas être tenu responsable des risques d’une décision défavorable. Une disposition qui, comme le reconnaît Mme Joubin-Bret, « sera vivement débattue ».

Garantie pour les frais en vertu des règles de la CSC

L’événement a accompagné le récent lancement du rapport de la CSC sur les frais d’arbitrage et la répartition des frais en vertu des règles de la CSC.. Plus tôt cette année, la CSC a publié une note de pratique sur la garantie des fraisune analyse approfondie de 23 demandes de garantie pour frais et de leurs perspectives de succès dans des affaires commerciales administrées par la SCC entre 2017 et 2022. Bien que la portée du rapport se limite aux litiges commerciaux, la SCC a également vu de nombreuses demandes dans des affaires d’investissement en le même laps de temps. Le rapport constate que seules deux des 23 demandes de garantie pour frais ont abouti. Cette conclusion reflète le caractère exceptionnel de l’octroi d’une garantie pour frais et le seuil élevé appliqué par les tribunaux. Comme l’a souligné M. Lowther, le rapport cherche néanmoins à fournir aux parties qui envisagent de demander une garantie pour frais un aperçu plus précis des cas où cela peut être approprié, par exemple en cas d’insolvabilité de l’une des parties au cours de la procédure. Rien que cette année, la CSC a dénombré huit demandes de garantie pour frais, dont plusieurs ont été accordées, indiquant que les propositions de l’art. 38 Les règles de la CSC commencent à gagner du terrain. Cependant, la CSC note également que la plupart des requêtes sont déposées dans le cadre de litiges internationaux en raison du manque historique d’outils garantissant les dépens en Suède, et d’ailleurs dans la plupart des juridictions de droit civil.

Cautionnement pour frais : la fracture entre le droit civil et la common law

Monique Sasson a également observé une divergence dans la manière dont les juridictions de droit civil et de common law gèrent la garantie pour dépens. Notamment, l’art. 98 du Code de procédure civile italien reconnaît une demande de garantie pour les frais. Cependant, cette disposition a été déclarée inconstitutionnelle par la Cour constitutionnelle italienne en décembre 1960.. Le tribunal a jugé que la disposition imposait un fardeau injustifié à l’accès du demandeur à la justice. Comme le souligne Monique Sasson, la décision a été critiquée et n’empêche pas, à ce jour, les arbitres d’accorder une garantie pour les frais dans les procédures ayant lieu en Italie. Cependant, l’appréciation de la Cour constitutionnelle italienne reflète le scepticisme à l’égard de la garantie pour les frais dans les juridictions de droit civil. En revanche, dans l’expérience de Monique Sasson en tant que conseillère et arbitre dans des systèmes de common law qui prévoient le transfert des coûts (c’est à dire« le perdant paie »), les règles des institutions arbitraires basées dans ces juridictions donnent souvent expressément au tribunal un large pouvoir discrétionnaire pour accorder une garantie pour les frais (par exempleSeconde. 38(3) de la loi anglaise sur l’arbitrage). Aux États-Unis, où l’application du principe du cost shifting dans les procédures judiciaires est relativement rare, même si les règles institutionnelles ne peuvent pas exclure la garantie pour les frais, la procédure est moins connue (la disparité entre les pratiques de répartition des frais dans l’arbitrage international et celles des États-Unis). Les litiges entre États ont également été abordés dans un rapport de l’Association du Barreau de New York. plus tôt cette année).

Remarques finales

Une demande de cautionnement pour frais nécessite un exercice d’équilibre entre l’intérêt du défendeur à obtenir le recouvrement des frais engagés et l’accès du demandeur à la justice. Même si la garantie pour frais n’est qu’un outil parmi d’autres permettant d’influer sur les coûts des procédures, de nombreuses lois nationales et règles institutionnelles manquent de normes uniformes sur lesquelles s’appuyer lors de la demande. Pour l’ISDS, le besoin d’uniformité est abordé par le Groupe de travail III de la CNUDCI, tandis que les parties aux différends commerciaux peuvent demander conseil dans le rapport publié par la SCC. Alors que la vague de normes uniformes favorise la popularité de la garantie pour les frais dans l’arbitrage international, sa montée en puissance implique un autre exercice d’équilibre. L’avenir devra montrer comment les institutions et les tribunaux parviennent à trouver un équilibre entre l’encouragement des demandes de garantie pour frais dans des circonstances appropriées, tout en maintenant son caractère exceptionnel pour sauvegarder l’accès du demandeur à la justice.

Author: Isabelle LOUBEAU